Et maintenant, elle se tenait devant son fiancé, qui semblait encore plus nerveux qu'elle, mais beaucoup plus comblé. Elle fut un instant tentée de dire "non" au moment de l'échange des consentements, mais la présence subtilement menaçante de son père l'en dissuada.
C'était la première fois que Léonie voyait son fiancé d'aussi près. Bien à contre-cœur, elle fut obligée de reconnaître que sa mère avait eu raison de le qualifier de "très bel homme". Quel dommage qu'il fût d'un rang social si inférieur au sien en plus d'être affublé de ce ridicule bégaiement !
Quand leurs mains se joignirent, elle sentit celles de Martial Lambert trembler légèrement entre les siennes. Il la couvait en outre d'un regard adorateur qui lui fut odieux sans qu'elle sache pourquoi. Après tout, ils ne se connaissaient pas, il n'avait aucun droit de la regarder ainsi... Ah si, il avait payé cinq acres de riches et grasses terres pour ce faire...
Par réflexe, elle retira brutalement ses mains de cette étreinte, mettant son fiancé dans l'embarras. Quelques secondes passèrent sans dissiper la gêne presque palpable qui s'installait. Martial ne savait comment réagir, déstabilisé par le comportement ouvertement hostile de sa fiancée. Enfin, il se décida à lui parler :
«P-p-p-p-p-p-uis-je vous passer cet aha-aha cet anneau au doigt ?»
Léonie inclina la tête dans un faux geste de soumission, mais au moment où Martial poussait l’anneau jusqu’à la troisième phalange, la jeune fille plia le doigt comme pour lui dénier la maîtrise de leur futur foyer.
Léonie avait agi ainsi par pure provocation mais elle ne s'attendait certes pas à ce que son mari réagisse de manière aussi gentille. Offrait-on un sourire bienveillant à la femme qui venait clairement de vous signifier que c'est elle qui porterait la culotte ? Mais rien n'aurait pu entamer le bonheur de Martial qui venait de s'unir à la femme dont il était si profondément amoureux. Comme il se penchait pour l'enlacer, il s'enhardit jusqu'à sceller leur baiser d'une promesse solennelle :
«J'-en-j'en... j'en-j'en... j'emploierai toute ma vie à v-v-v-vous rendre heureuse...»
Le baiser qu'il lui donna était timide et maladroit mais les deux mains chaudes qu'il avait plaquées sensuellement sur la nuque et la taille de sa jeune épouse exprimaient la passion qui l'animait. Bien malgré elle, Léonie se sentit toute troublée.
Après l'inévitable baiser traditionnel, Martial, le cœur noyé d'extase, ne put s'empêcher de se laisser aller à une familiarité de mauvais aloi : il embrassa sa femme tendrement sur la joue devant toute l'assistance.
Ce geste intime, c'était terriblement indécent ! Quel rustre !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire